La présentation de la face

La présentation de la face est une présentation céphalique complètement défléchie. Sa fréquence est de 3 pour 100 naissances.

ÉTIOLOGIES

Ce mode de présentation peut être secondaire s’il se constitue en cours de travail , ou primitif s’il existe avant tout début de travail.

Les présentations primitives de la face, dont l’existence a été reconnue par la pratique de radiographies du contenu utérin , sont très rares et n’ont souvent aucune cause apparente. Elles peuvent aussi être liées à des malformations vertébrales, des tumeurs du cou, une anencéphalie. 

Aucune cause n’apparaît véritablement déterminante dans les présentations secondaires et peut-être faut-il plutôt parler de l’association de divers facteurs favorisants qui gênent l’accomodation fœtopelvienne tels que : hydramnios, grande multiparité, disproportions fœto-pelviennes par excès de volume fœtal ou bassins modérément rétrécis, insertions basses du placenta.

VARIÉTÉS DE POSITION

Le repère de la présentation est le menton.

Le grand diamètre de la tête occupant habituellement le diamètre oblique gauche, la variété la plus fréquente est donc une mento-iliaque droite postérieure : MIDP, plus rarement une MIGA. Les deux positions qui concernent le diamètre droit, MIDA et MIGP sont exceptionnelles. Les positions transverses, MIDT et MIGT sont possibles à l’engagement en cas de bassin plat ou comme position intermédiaire lors de la descente et la rotation.

DIAGNOSTIC DE LA PRÉSENTATION DE LA FACE

PENDANT LA GROSSESSE

En théorie :

— il s’agit d’une présentation longitudinale, parfois associée à un excès de liquide ;

— les bruits du cœur sont nettement perçus du côté opposé au plan du dos ;

— la palpation perçoit le siège dans le fond utérin, la tête débordant largement la symphyse pubienne, le plan du dos est du même coté que la proéminence céphalique et cette dernière délimite avec le dos en hyperlordose le typique «coup de hache externe» ;

— le toucher vaginal perçoit, à travers un segment inférieur épais, une présentation élevée et irrégulière. Seul l’examen radiographique du contenu utérin permettrait d’affirmer le diagnostic.

En pratique, le diagnostic n’est presque jamais fait, et l’on peut dire que la présentation de la face ne peut pas être prévue par l’examen de la femme pendant la grossesse.

AU COURS DU TRAVAIL

Le toucher à travers les membranes met en évidence d’un côté le front, puis les arcades orbitaires cernant les globes oculaires mous, puis au centre de la présentation la saillie pyramidale du nez dont on note la direction, puis la bouche qui peut sucer le doigt et enfin la saillie du menton ; le diagnostic n’étant certain que lorsque ce dernier est palpable, indiquant du coup la variété de présentation qu’il est indispensable de préciser.

Le toucher vaginal peut être difficile si la poche des eaux est rompue depuis longtemps modifiant le relief de la face par une infiltration œdémateuse.

La présentation de la face doit être distinguée des présentations du siège et du front :

— le siège : la bosse sérosanguine peut simuler un siège décomplété si l’on confond la bouche avec l’anus et le nez avec le sacrum. Mais dans la face, la bouche peut être animée de mouvements de succion et l’on perçoit le menton ;

— le front serait caractérisé par la fontanelle bregmatique que l’on ne perçoit pas dans la face. De plus le menton n’est jamais atteint dans le front. La présentation du front est le diagnostic différentiel le plus important en pratique car elle imposerait une césarienne immédiate.

MÉCANISME DE L’ACCOUCHEMENT

L’ENGAGEMENT    

La tête s’oriente dans une majorité de cas dans le diamètre gauche et s’engage assez facilement,

— le plus souvent en MIDP ;

— ou en MIGA ;

— plus rarement en MIDA ou MIGP ;

— les positions transverses sont des positions intermédiaires.

L’amoindrissement des diamètres de la tête est ici obtenu par une déflexion extrême présentant au détroit supérieur le sous-mento-bregmatique (9,5 cm) ou plus exactement sous-occipito-bregmatique des présentations du sommet tête fléchie. Mais cela ne suffit pas, car, l’engagement de la face proprement dit étant acquis, c’est ensuite le bloc céphalo-thoracique qui se présente, son diamètre pré-sterno-syncipital (15 cm) étant inacceptable pour le bassin. 

Pour que la descente se poursuive, il faut que se produise une désolidarisation de ce bloc céphalo-thoracique.

LA DESCENTE ET LA ROTATION

Elles ne sont possibles qu’en avant, ce qui nécessite une rotation haute et précoce du menton en avant.

Cette rotation sera de :

— 1/8e de cercle pour les MIGA et MIDA ;

— 1/4 de cercle pour les positions transverses ;

— 3/8e de cercle pour les positions postérieures.

La descente dure ainsi plus longtemps s’il s’agit au départ d’une variété mento-postérieure.

Le menton parvient donc à se fixer sous la symphyse pubienne ce qui permet alors à la tête de se fléchir : la voûte crânienne, se désolidarisant du tronc, balaie la concavité sacrée et la tête se dégage, face en haut. On voit apparaître successivement le menton, la bouche, le nez, le front, puis la voûte crânienne. Cette dernière représente un danger pour le périnée et les indications de l’épisiotomie doivent être larges.

Bien qu’eutocique, cette présentation a pour conséquences: un travail relativement long du fait de la mauvaise ampliation du segment inférieur par une présentation irrégulière, de la fréquente rupture précoce des membranes (avec risque de procidence du cordon), du mauvais appui fourni au système cervico-segmentaire par cette face qui reste longtemps élevée, d’un diamètre d’engagement qui est précisément trachéo-bregmatique et mesure 10,2 mm, soit 7 mm de plus que le sous-mento-bregmatique ;

et aussi un aspect particulier du nouveau-né: attitude en ospistotonos avec lordose dorsale, tête défléchie, dolichocéphale du fait du modelage, face tuméfiée, parfois siège d’une véritable bosse sérosanguine, avec infiltration œdémateuse et possibilité d’excoriations et de phlyctènes des paupières des joues et des lèvres, cri rauque dû à un œdème laryngé par compression du cou.

Il faut prévenir les parents du caractère fugace de cet aspect inhabituel qui risque de les impressionner.

Seule, la rotation du menton en avant, permet donc l’accouchement de la face. Si par malheur le menton tournait en arrière, la tête s’enclaverait, ne pouvant s’échapper car butant sur le plan sacro-coccygien, l’accouchement serait impossible et conduirait assez rapidement à la mort fœtale en l’absence de césarienne.

CONDUITE À TENIR

Dans la majorité des cas, l’accouchement se termine naturellement car la présentation de la face est eutocique. Il faut parfois savoir attendre l’évolution spontanée ; la rotation du menton en avant étant lente dans les mento-postérieures. Il ne faut cependant pas trop attendre la descente et, le temps travaillant contre le fœtus, savoir intervenir avant l’apparition d’une souffrance fœtale.

Plusieurs difficultés sont possibles :

-la face ne s’engage pas et se bloque au-dessus du détroit supérieur : la césarienne s’impose ;

-la face s’est engagée mais se bloque dans l’excavation :

si la tête est en mento-postérieure, voire enclavée, la césarienne s’impose.; toute rotation au forceps est formellement interdite ;

si la tête est en position antérieure, MIGA ou MIDA, il faut tenter de compléter la rotation en mento-pubien par une rotation manuelle douce en faisant pousser la femme; en cas d’échec la césarienne s’impose. Lorsque la tête est bloquée en mento-pubien, deux attitudes sont possibles :

-soit la césarienne ;

-soit une tentative de forceps qui aurait pour effet d’accentuer progressivement la flexion de la tête. En fait, le forceps sur présentation de la face, même si la présentation est sagittale, est dangereux car les extrémités des cuillères sont appliquées sur la vôute crânienne qui est malléable et vulnérable. Il ne peut donc être réalisé que s’il est facile, et par un obstétricien prudent et expérimenté. Dans tous les autres cas la césarienne est préférable.