Le risque d’accouchement prématuré

Un accouchement est dit prématuré lorsqu’il survient  entre 22 et 36 SA révolues. Les risques pour le bébé sont un peu proportionnels à la précocité de la naissance. Le bébé qui naît entre la 35e et la 36e semaine est généralement peu exposé. Souvent, il est simplement fragile et est placé dans un centre ordinaire de prématuré. Parfois même, on le laisse près de sa maman. Le contact avec sa mère peut faire des miracles et est considéré comme la meilleure des thérapies.

Par contre, le bébé qui naît à moins de 35 semaines de grossesse et pèse moins de 2 kilos doit faire l’objet de soins particuliers. Il est en effet exposé à de multiples complications: difficultés respiratoires, difficultés à réguler sa température, difficultés à téter, plus grande sensibilité aux infections, hémorragies cérébrales, etc. La mortalité et la morbidité néonatales sont étroitement liées à l’âge gestationnel à la naissance. La principale de ces complications est la maladie dite des membranes hyalines. La maladie des membranes hyalines (MMH) se traduit par un syndrome de détresse respiratoire, chez 10 à 40 % des prématurés.
Elle est responsable de 20 à 50 % de décès. Elle est d’autant plus fréquente que l’âge gestationnel est faible (2,5 % à 36 semaines d’aménorrhée et 60 % avant 28 semaines d’aménorrhée). En effet, la survenue de la MMH est due à l’immaturité pulmonaire des prématurés. La maturation pulmonaire (structure sphérique de l’al- véole et composition adéquate du surfactant) du fœtus n’est obtenue totalement qu’à partir de 35 semaines d’aménorrhée. La ventilation assistée et l’administration de surfactant artificiel permettent de compenser cette immaturité respiratoire. Le traitement par glucocorticoïdes exogènes administrée avant la naissance à la future mère permet d’accélérer la maturation fonctionnelle du poumon et de réduire la fréquence et la gravité de la MMH en cas d’accouchement prématuré

La prématurité représente 7% des naissances en France et est responsable de 75% des morts néonatales. Les MAP représentent et de loin la première cause d’hospitalisation chez les femmes enceintes.

La menace d’accouchement prématuré (MAP) survient entre 22 et 36 SA révolues et se caractérise par l’association de modifications cervicales et de contractions utérines (CU) régulières et douloureuses qui risquent de conduire à l’accouchement prématuré en l’absence d’intervention médicale. Toutefois, toutes les menaces ne conduisent pas à un accouchement prématuré, loin s’en faut et cela a pour conséquence un nombre important d’hospitalisations et de traitement inutiles. Toute la difficulté est donc de faire la différence entre les vraies et les fausses MAP afin d’éviter à ces dernières des traitements trop agressifs.

I-Causes et facteurs de risques de la prématurité

La naissance prématurée peut être de survenue spontanée ou médicalement provoquée.

A-La prématurité spontanée

Les accouchements prématurés spontanés sont les plus fréquents des accouchements prématurés (environ les 2/3).
Ils comprennent les menaces d’accouchement prématuré trop évoluées, avec ou sans rupture prématurée des membranes, l’accouchement étant inéluctable, et les échecs de la tocolyse. Indépendamment du terme, ces accouchements prématurés surviennent dans 20 à 45 % des cas après une rupture prématurée des membranes.  Dans ce cas, la mise en œuvre d’une tocolyse n’empêche bien souvent pas la survenue d’un accouchement prématuré.

    1-parfois la cause est connue ou reconnue. Elle peut être maternelle: infections urinaires, infections cervico-vaginales, autres infections (dont la listériose), anémie sévère par carence en fer, traumatismes (chute, intervention chirurgicale). Elle peut être obstétricale: malformations obstétricales (hypoplasie, utérus cloisonné, exposition au distilbène in utero…), certains fibromes interstitiels,  béances cervico-isthmiques. Elle ovulaire ou foetale: grossesse multiple, placenta praevia, hydramnios, chorio-amniotite, rupture prématurée des membranes.

    2-Parfois il n’y a pas da cause identifiable mais on peut mettre en évidence des facteurs dits de risques, ce qui peut avoir un intérêt préventif:

        -Facteurs physiologiques

             -l’âge : inférieur à 16 ans ou supérieur à 40 ans (en fait ce sont surtout les mauvaises conditions de vie plutôt que l’âge qui expliquent la prématurité),
            – une parité élevée : supérieure à 4.

            -certains  antécédents d’interruption volontaire de grossesse, de fausse-couche, de curetage ou de prématurité.

      -Facteurs sociologiques:

            – future mère vivant seule,

            – un bas niveau socio-économique,

            – l’absence d’activité professionnelle,

            – un emploi avec une charge ou une durée de travail élevé ou un long trajet quotidien,

            – un logement sans ascenseur, nécessitant la montée de plus de trois étag ,    

            -la consommation de plus de 10 cigarettes par jour, 

             -un ou des enfant(s) à charge,
            – l’existence de grossesses rapprochées.

B-La prématurité provoquée,

c’est-à-dire décidée par les obstétriciens représente 1/3 des accouchements prématurés.
Elle est secondaire à certaines pathologies gravidiques, telles que la toxémie gravidique, les retards de croissance intra-utérins, les ruptures prématurées des membranes, les hémorragies (placenta praevia), ou, plus rarement, le diabète. La décision d’arrêter la grossesse se fait dans l’intérêt de l’enfant et/ou de la mère.

II-Vraies et fausses MAP: comment faire la différence?

On dispose de quatre types d’arguments: 

1-L’interrogatoire et l’examen clinique de la patiente précisent la fréquence et l’intensité des contractions utérines qui sont également palpables. Le toucher vaginal peut montrer ou non des modifications du col.

2-Le monitorage permet d’objectiver la réalité de ces contractions et leur fréquence.

3-L’échographie du col est plus précise et plus reproductible que le toucher vaginal pour évaluer la longueur cervicale. La longueur cervicale est le critère le plus étudié et semble plus discriminant que la largeur de l’orifice interne ou la protrusion des membranes  (funneling) qui doivent être utilisées avec prudence dans les décisions. En cas de MAP, les seuils de longueur cervicale les plus discriminants pour prévoir l’accouchement prématuré se situent entre 20 et 30 mm. Il est difficile de recommander un seuil particulier. Par contre, un col long et fermé à l’échographie à une forte valeur prédictive négative c’est-à-dire élimine presque à coup sûr le risque d’accouchement prématuré et permet de diminuer le nombre d’hospitalisations et de traitements inutiles.

3-La fibronectine est une glycoprotéine placentaire secretée exclusivement par le trophoblaste. Elle est présente dans le liquide amniotique et son rôle est de permettre la fixation de l’oeuf à l’endomètre. Elle est normalement présente dans les secrétions vaginales jusqu’à la 22ème semaine et aussi en fin de grossesse après 34 semaines. Par contre entre 23 et 34 semaines sa présence au niveau vaginal est anormale et traduit une altération des membranes foeto-maternelles et donc un risque d’accouchement prématuré.

La technique fait appel à un simple prélèvement du cul-de-sac vaginal postérieur ou de l’exocol. Mais il faut savoir que l’existence de rapports sexuels ou d’un toucher vaginal dans les 24 dernières heures ainsi que la présence de métrorragies donnent des résultats faussement positifs. En cas de MAP, la valeur diagnostique de la fibronectine semble être supérieure à celle de l’examen clinique. Sa valeur prédictive négative est en particulier excellente. 

III-Relations entre MAP et infections

L’accouchement prématuré est parfois lié à une infection intra-utérine asymptomatique. Son diagnostic n’est le plus souvent porté qu’a posteriori. De nombreux marqueurs ont été étudiés pour diagnostiquer précocement une infection infraclinique. Cependant, si la plupart de ces marqueurs sont associés à un accouchement prématuré, il n’existe pas de données concernant une conduite à tenir efficace lorsqu’ils sont présents (antibiothérapie anténatale, accouchement). Ils doivent donc être interprétés en fonction des autres éléments (fièvre maternelle, tachycardie fœtale…). Ces marqueurs sont: la CRP, L’hyperleucocytose, certains germes présents dans le vagin ou une vaginose. De nombreux germes pathogènes sont trouvés dans les cas de menaces d’accouchement prématuré (streptocoque B, E. coli…) mais leur mise en évidence n’a qu’une valeur pronostique très faible.  La vaginose bactérienne correspond au remplacement de la flore vaginale normale par des germes anaérobies stricts ou facultatifs. Le risque relatif d’accouchement prématuré chez une patiente présentant à la fois une MAP et une vaginose est multiplié par 2. Cependant, la causalité directe reste très discutée.

L’administration systématique d’une antibiothérapie en cas de MAP avec membranes intactes n’est pas recommandée et ne donne aucune réduction de la prématurité et aucune amélioration de l’état néonatal. De plus, une large prescription entraînerait la sélection de germes résistants aux antibiotiques classiques. Les traitement locaux vaginaux systématiques n’ont pas fait non plus la preuve de leur efficacité pour réduire la prématurité et les risques infectieux materno-fœtaux. Il n’y a pas d’arguments formels en faveur d’un traitement antibiotique lorsque la MAP est associée à un prélèvement vaginal positif (germes banals, ureaplasma ou chlamydia) ou à une vaginose bactérienne. La présence de germes dans les urines (bactériurie asymptomatique) est par contra traitée systématiquement.

IV-Tocolyse et traitement de la MAP

La tocolyse est un traitement visant à diminuer ou arrêter les contractions utérines lors des menaces d’accouchement prématuré. Bien que les tocolytiques ne permettent généralement pas d’empêcher l’accouchement prématuré, une tocolyse de courte durée vise essentiellement à retarder l’accouchement d’environ 48 heures, rarement de plus de 7 jours. On met à profit ce délai pour réaliser un traitement corticoïdes qui accélère la maturité pulmonaire du bébé.

A-Les produits tocolytiques disponibles

…sachant que le repos est toujours utile et indiqué…

    1-Les bêta-mimétiques. Ils sont historiquement utilisés depuis 1961. Ils sont actuellement de moins en moins utilisés en raisons de leurs effets secondaires (douleurs thoraciques, palpitations, tremblements, céphalées, hypokaliémies,  hyperglycémies, nausées, vomissements, dyspnée, oedème aigu du poumon, tachycardie foetale… Pour ces raisons ils sont de moins en moins utilisés.

    2-Les antagonistes de l’Ocytocine. C’est l’Atosiban (Tractocile®).  Ils ont une efficacité identique aux bêta-mimétiques mais sans tous leurs effets secondaires. L’inconvénient de ce type de produit est un coût assez élevé qui en limite l’utilisation. 

    3-Les inhibiteurs calciques

Les inhibiteurs calciques (nifédipine, nicardipine) présentent moins d’effets indésirables que les bêta-mimétiques tout en étant aussi efficaces, voire plus. Bien que n’ayant pas d’AMM dans le traitement des MAP, ils sont de plus en plus utilisés. Deux produits sont utilisables: la Nifédipine (Adalate®) et  la Nicarpidine (Loxen®).

La nifédipine est utilisée par voie orale dans une forme d’action rapide (Adalate® capsule 10mg) et dans une forme micro-cristalline à libération prolongée dosée à 20 ou 30mg (Adalate LP® 20mg et générique ; Chronadalate® [30mg] et générique).

La nicardipine est utilisée par voie injectable IV (Loxen® et générique 10mg/10ml) ou par voie orale dans une forme à libération immédiate (Loxen® cp sécable à 20mg) et dans une forme à libération prolongée dosée à 50mg (Loxen LP® 50mg).

La voie sublinguale ne doit jamais être utilisée chez la femme enceinte en raison du risque d’accidents ischémiques chez la mère et du risque d’hypoperfusion placentaire et de ses conséquences fœtales.

Les effets indésirables non graves de la nifédipine et de la nicardipine chez la femme enceinte ne sont pas différents de ceux observés chez l’adulte non gravide : céphalées, bouffées vasomotrices, palpitations, vertiges, nausées.

La vasodilatation artérielle liée aux ICC étant dépendante de l’état de vasoconstriction préalable, il n’est pas attendu d’effet hypotenseur significatif lorsque la nifédipine ou la nicardipine sont prescrits dans la tocolyse chez des femmes non hypertendues.

L’instauration d’un traitement d’entretien après 48heures de tocolyse efficace n’a pas d’intérêt pour la diminution de la prématurité et ne diminue pas la morbi-mortalité néonatale (NP1).

La tocolyse d’entretien ne permet pas de diminuer le recours à une nouvelle tocolyse d’attaque.

En l’absence de tout bénéfice rapporté, la tocolyse d’entretien n’est pas recommandée, quelle que soit la molécule utilisée.

  4-Le sulfate de Magnésie est largement utilisé dans les pays anglo-saxons, et parfois même en première intention. L’efficacité est identique à celle des bêta-mimétiques.  Il est en revanche rarement utilisé en France en raison de ses effets indésirables. Il faut craindre un risque de dépression respiratoire maternelle au delà d’une concentration sérique supérieure à 6 mEq/l.

    6-La Progestérone. La progestérone naturelle par voie orale ou vaginale (utrogestan®) a longtemps été utilisée bien que son efficacité n’ait jamais été scientifiquement démontrée. Elle peut entraîner la survenue d’hépatite médica- menteuse avec cholestase gravidique. Elle ne doit donc plus être utilisée après le premier trimestre de la grossesse. 

    7-Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Les AINS sont des tocolytiques efficaces, mais ils ne sont quasiment plus prescrits du fait de leurs effets indésirables maternels et surtout fœtaux (fermeture prématurée du canal artériel, altération de la fonction rénale). Ils sont d’ailleurs contre-indiqués à tout moment de la grossesse. Ils n’ont été utilisés (indométacine, kétoprofène) que de manière ponctuelle en cas d’échec ou de contre-indication d’un autre traitement.

    8-Les antispasmodiques n’ont pas d’efficacité démontrée.

    9-Le cerclage du col n’est pas un traitement de la menace d’accouchement prématuré.

    10-Le Tractocile ® (Atociban) est le dernier né des tocolytiques. Son usage reste limité en raison de son coût. Il s’agit d’un antagoniste compétitif de l’ocytocine au niveau des récepteurs utérins. Il bloque sa capacité à provoquer et à maintenir les contractions utérines.

Le Tractocile® est indiqué pour retarder l’accouchement en cas de menace d’accouchement prématuré chez les femmes :

présentant des contractions utérines régulières d’au moins 30 secondes et survenant

au moins 4 fois en 30 minutes

ayant une dilatation du col de 1 à 3 cm (0-3 cm nullipares) et un effacement de  50%

âgées de 18 ans au moins

ayant un âge gestationnel de 24 semaines à 33 semaines incluses

présentant un rythme cardiaque fœtal normal

Il est aussi efficace que les sympathomimétiques avec une meilleure tolérance cardio-vasculaire : l’ensemble des paramètres utilisés permet de constater une diminution générale de tous les événements secondaires maternels, en particulier cardio-vasculaires simples (tachycardie, palpitations, dyspnée).

mode d’administration 

1ère étape : 0.9 ml en bolus IV en 1minute = 6.75 mg d’atociban 

2ème étape : perf de charge IV 24ml/heure = 18 mg atociban/heure 

3ème étape : perf entretien IV 8ml /heure = 6 mg atociban/heure la durée de traitement ne doit pas dépasser 48 h

Ce traitement est  à réserver en première intention pour les patientes ayant une pathologie cardio-vasculaire contre-indiquant les sympathomimétique,  les grossesses multiples,la poursuite de prise en charge de patientes transférées avec un traitement au Tractocile® en cour.s

B-Les corticoïdes pour la maturation pulmonaire foetale

On utilise la bêtaméthsone par voie intramusculaire. La période d’utilité est entre 24 et 34 semaines. L’efficacité des corticoïdes est démontrée à partir de 24 heures après le début du traitement et jusqu’à 7 jours (NP1). Il existe des arguments pour penser que l’efficacité peut exister avant 24 heures et après 7 jours. Il paraît utile de débuter une cure de corticoïdes même quand l’accouchement paraît imminent. Il est préférable, lorsque cela est possible, de n’utiliser qu’une cure de corticoïdes. Si la patiente n’a pas accouché au bout de 7 jours, il n’est pas justifié de répéter systématiquement les cures de corticoïdes de manière hebdomadaire. Cependant, si le risque d’accouchement très prématuré semble s’aggraver, une nouvelle cure peut être prescrite.

C-Les contre-indications à la tocolyse

Certains accouchements prématurés sont salvateurs pour l’enfant qui sinon serait menacé in utero. Ces cas sont donc des contre-indications à toute tocolyse:

    -Chorio-amniotite

    -Souffrance foetale

    -Pré-éclampsie sévère ou crise d’éclampsie

    -Hémorragie génitale

    -Hématome rétroplacentaire

IV- cas particuliers

A- Grossesses gémellaires

La part de la grande prématurité (< 33 SA) liée aux grossesses multiples est proche de 20 %. L’efficacité de la tocolyse pour prolonger la grossesse semble proche de celle obtenue dans les grossesses uniques.

Les béta-mimétiques exposent à un risque accru de complications cardiovasculaires, notamment d’œdème aigu du poumon, en cas de grossesse multiple. Les inhibiteurs calciques et les antagonistes de l’ocytocine peuvent être proposés comme tocolytiques de première intention dans cette situation, du fait de la rareté de leurs effets secondaires cardiovasculaires.

Le bénéfice des corticoïdes en cas de grossesse multiple est moins bien démontré que pour les grossesses uniques mais peut être pratiquée.

B-Femmes rhésus négatives.

Si le foetus est Rh+ une injection d’immunoglobulines anti-Rh est indiquée en cas de MAP (si elle n’a pas été faite au 6ème mois.)

C-Métrorragies sur placenta praevia

V-Conclusion sous forme de diapositives