Les inséminations artificielles

L’insémination artificielle est une technique connue depuis très longtemps, simple et indolore, qui consiste à déposer à l’aide d’un fin cathéter  le sperme au préalable préparé au laboratoire dans la cavité utérine pour augmenter les chances de rencontre entre l’ovocyte et les spermatozoïdes. L’insémination artificielle au niveau du col est aujourd’hui abandonnée. On utilise généralement le sperme frais du conjoint et l’on parle d’insémination artificielle avec conjoint (IAC), mais l’insémination est possible avec du sperme congelé voire avec du sperme de donneur et l’on parle d’insémination avec sperme de donneur (IAD).

Les bonnes indications de l’insémination

Il est indiqué de recourir aux inséminations artificielles dans les cas suivants :

D’une manière générale, on ne peut envisager des inséminations que si les trompes utérines sont perméables, que si le spermogramme est normal ou peu perturbé et que le test de migration-survie est compatible avec la méthode. En outre, l’âge ne doit pas être trop avancé. En effet à partir de 37-38 ans, il est préférable de recourir directement à la fécondation in vitro pour des raisons d’efficacité.

Les mauvaises indications de l’insémination

Par contre, l’insémination ne doit pas être choisie si les trompes ne sont pas normales, si le spermogramme est fortement perturbé, si le test de survie aboutit à moins de 1000000 de spermatozoïdes mobiles et si l’âge est trop avancé. En effet, on peut considérer qu’après 38 ans, la réalisation d’inséminations risque de faire perdre un temps précieux retardant le recours à la fécondation in vitro dont on sait que les chances de succès diminuent rapidement avec l’âge. Enfin, la présence en quantité significative d’auto-anticorps anti-spermatozoïdes (avec un Mar test fortement positif) rend inutile la pratique des inséminations et doit faire diriger directement vers une Fécondation in vitro avec ICSI.

Comment  l’insémination peut-elle être efficace ?

L’efficacité attendue de l’insémination  résulte de la conjonction de plusieurs facteurs :

-la stimulation de l’ovulation, qui doit toujours accompagner l’insémination, est une stimulation dite pauci-folliculaire, c’est-à-dire qu’elle vise à obtenir  non pas une ovulation unique, mais, si possible la maturation de deux ou trois follicules (pas plus) afin d’obtenir deux ou trois ovocytes. Cette stimulation, modérée, est indispensable à l’amélioration des chances de grossesse. On parle stimulation pauci-folliculaire, par opposition à la fécondation in vitro où la stimulation est multi-folliculaire.

-La préparation du sperme au laboratoire permet de sélectionner et de n’utiliser que les spermatozoïdes les plus mobiles, donc à priori les plus fécondants.

-La connaissance précise de la date de l’ovulation, puisqu’elle est généralement déclenchée par une injection d’HCG à la suite d’un monitorage rigoureux de la phase de stimulation, permet d’optimiser les chances de fécondation.

-Enfin, le fait de déposer les spermatozoïdes dans la cavité utérine à proximité des orifices des trompes favorise également les chances de fécondation, laquelle rappelons-le se produit dans la trompe. 

Bilan préalable à une insémination

La décision d’entamer des inséminations ne se conçoit qu’après un bilan masculin et féminin de l’infertilité. Chez la femme, on a vu en particulier que les trompes doivent être perméables (hystérographie normale et éventuelle cœlioscopie normale), mais il faut aussi disposer de dosages hormonaux, d’une évaluation de la réserve ovarienne, d’une échographie pelvienne et du statut sérologique concernant la rubéole (et éventuellement de la toxoplasmose). Chez l’homme, même en cas de spermogramme normal, il est indispensable de réaliser un test de migration-survie avant toute tentative d’insémination. Enfin pour les deux partenaires, un bilan sérologique datant de moins d’un an doit être disponible et normal: sérologies pour la syphilis, les hépatites B et C, le SIDA.

Aspects pratiques des inséminations

1-La stimulation pauci-folliculaire de l’ovulation

Cette stimulation vise à obtenir un ou deux follicules, trois au maximum, ce qui augmente les chances de grossesse. On parle de stimulation mono ou pauci folliculaire.

La stimulation ovarienne peut utiliser soit le citrate de clomifène (Clomid® ou Pergotime®, soit des gonadotrophines à effet FSH (FSH recombinantes comme le Gonal F® ou le Puregon®, soit parfois HMG –Gonadotrophines extraites d’urines de femmes ménopausées- comme le Menogon® contenant de la FSH et de la LH. A l’EMC, nous utilisons généralement le Puregon® (voir plus loin les modalités d’utilisation de ce produit). Ces traitement nécessitent une surveillance échographique éventuellement couplée à des dosages hormonaux, et demandent donc une assez grande disponibilité de la part des patientes.

En général le Puregon® est utilisé, soit seul, soit associé au  Clomifène. Le Clomifène seul n’a pas fait la preuve de son efficacité. L’association Clomifène + Puregon® permet principalement de diminuer les doses  de Puregon® administrées au cours du Cycle de stimulation.

Les médicaments utilisés sont administrés par voie sous-cutanée. Ces injections sont très faciles à réaliser soi-même (peau de l’abdomen ou de la cuisse) à l’aide se stylos auto-piqueurs, à condition d’avoir reçu une formation. C’est pour cela que nous organisons des séances d’apprentissage de l’auto-injection.  Ces injections peuvent également être pratiquées par le conjoint. Ce type d’auto-injections est détaillé plus loin dans un chapitre spécial.

Le traitement commence au 3ème ou 5ème jour du cycle pour le Puregon® (1er jour du cycle = 1er jour des règles) ou dès les deuxième ou troisièmes jours pour le Clomifène. Il s’agit d’injections quotidiennes intramusculaires ou sous-cutanées de Gonal F ®ou de Puregon ® (FSH recombinante). 
La surveillance de la stimulation commence au 10ème jour du cycle. Celle-ci est assurée : d’une part par l’échographie réalisée dans le service pour mesurer et compter les follicules et évaluer l’épaisseur de l’endomètre, et d’autre part par un dosage hormonal (œstradiol).  La surveillance régulière  a pour objectif d’adapter le traitement à la qualité de la stimulation observée. Ainsi en fonction des résultats, les médecins adapteront les modalités du traitement et de la surveillance.

Lorsque le ou les follicules sont mûrs (plus de 18mm de diamètre par follicule ou/et taux d’œstradiol supérieur à 300pg/ml/follicule, il est possible de déclencher l’ovulation par une injection intramusculaire d’HCG (5000 unités). L’insémination a lieu généralement 38 heures plus tard.

Si l’on observe la croissance simultanée de plus de trois follicules, la stimulation doit être arrêtée, une contraception proposée jusqu’à la fin du cycle, cela afin de prévenir le risque de grossesse multiple. A l’opposé, l’abandon de la tentative peut être motivé par une mauvaise réponse ovarienne (hypostimulation). Ces mauvaises réponses ovariennes nécessiteront une modification du protocole thérapeutique pour une tentative ultérieure.

Répétons-le, la technique est indolore. Il n’y a ni hospitalisation, ni arrêt de travail.

2-Les conditions de recueil du sperme

Il est très important d’avoir un délai d’abstinence de 3 à 5 jours. Le recueil du sperme se fait au laboratoire par masturbation et il faut s’assurer du respect rigoureux des consignes de recueil (voir le paragraphe consacré au spermogramme). Il est indispensable que les hommes urinent juste avant le recueil afin de « nettoyer l’urètre » pour éviter les contaminations bactériennes. Il est demandé aux hommes de se laver soigneusement la verge et les mains à l’eau et au savon. Le recueil est fait dans une pièce prévue à cet effet seul ou avec la conjointe si le couple le désire. Un contrôle d’identité sera effectué juste avant le recueil. 
Après recueil par masturbation dans un réceptacle stérile, le sperme est préparé au laboratoire afin de reproduire les modifications subies lors d’un rapport sexuel, quand les spermatozoïdes traversent la glaire cervicale.

3-La préparation du sperme

Le principe est d’assurer une séparation des cellules en fonction de leur mobilité par des phénomènes physiques qui sont la traversée de liquides de différentes densités et la centrifugation. 
Les spermatozoïdes les plus mobiles traverseront facilement tous les obstacles rencontrés. Ils seront ensuite lavés avec un milieu de culture approprié. A ce stade, les spermatozoïdes sélectionnés peuvent féconder l’ovocyte. On dit qu’ils ont acquis une capacitation. 

Cette préparation, qui est réalisée au sein du laboratoire d’AMP par l’embryologiste, consiste en une séparation des spermatozoïdes du plasma séminal,  à éliminer les débris cellulaires et autres cellules  et à  sélectionner les spermatozoïdes mobiles et normaux aptes à féconder.  On leur fait subir une migration (swim up), et une centrifugation en gradient de densité. La fraction la plus dense contient les spermatozoïdes les plus mobiles. Après lavage de cette fraction, les spermatozoïdes sont mis en suspension dans un milieu spécial (utilisé en fécondation in vitro). L’objectif est d’obtenir au moins 1000000 de spermatozoïdes mobiles. Si la préparation permet d’obtenir plus de 10 000 000 de spermatozoïdes, une dilution sera effectuée.

Le principe de l’insémination artificielle

4-L’insémination proprement dite

Il y a possibilité de fécondation si des spermatozoïdes fécondants sont présents dans la trompe entre 0 et 16 heures après l’ovulation, soit 38 à 54 heures après la montée du taux de LH ou après l’injection d’HCG. L’insémination est réalisée à l’aide d’un tube souple (appelé cathéter) qui est introduit dans la cavité de l’utérus. Il s’agit d’un geste tout a fait comparable à un simple examen gynécologique, nécessitant simplement la mise en place d’un spéculum. Il est important que votre vessie soit pleine au moment du transfert.  Vous devrez donc prendre vos précautions pour boire suffisamment et ne pas uriner au moins une heure avant  le moment prévu du transfert. Une vessie pleine diminue l’angle formé entre le col et le corps de l’utérus et facilite grandement la procédure. L’injection de la préparation ne dure que quelques secondes et un repos allongé d’environ 5 minutes est suffisant. Il est ensuite possible de reprendre une activité normale et les rapports sexuels sont possibles après l’insémination.

Une double insémination dans le même cycle n’apporte aucun bénéfice supplémentaire.

Dans la plupart des cas, aucun traitement n’est nécessaire après l’insémination. De plus, aucune précaution particulière n’est à prendre. 
Si la tentative a échoué, les règles surviennent environ 12 jours après l’insémination. 
Si les règles n’apparaissent pas, un test de grossesse est réalisé 18 jours après l’insémination afin de faire le diagnostic de grossesse.

Résultats

On considère que l’insémination double les chances naturelles de grossesses pour peu que ses indications en soient bien posées. En pratique, on estime les chances de grossesse entre 10 et 20%, chiffres qui sont à comparer avec les 20% des chances pour un couple fécond d’obtenir une grossesse à chaque cycle, sans oublier que dans le cas des IAC on s’adresse à des couples par définition infertiles.

Complications

Il n’y a pas de complication liée directement à l’insémination. Par contre, la survenue d’une hyperstimulation ovarienne est possible en relation avec l’utilisation des médicaments inducteurs de l’ovulation. Elle se manifeste par  des douleurs et une augmentation de volume de l’abdomen. Le monitorage de la stimulation vise à prévenir ce genre de problème. L’autre conséquence éventuellement à risque est la survenue d’une grossesse gémellaire. Le taux de gémellaire dans ces cas est de 15 à 20% si l’on s’astreint  à une stimulation paucifolliculaire, mais on sait que l’efficacité augmente si l’on obtient 2 ou 3 follicules. On a pu observer jusqu’à 3% de grossesses triples.

Que faire en cas d’échec ?

Il faut savoir que 90% des grossesses sont obtenues lors des premières tentatives et c’est maintenant une règle de bonne pratique de ne pas dépasser 4 tentatives.  Six serait un maximum pour des cas particulièrement favorables. Il faut ensuite passer à d’autres techniques comme la fécondation in vitro.

Il n’est pas nécessaire  d’observer un cycle de repos entre chaque tentative, sauf dans certains cas d’ovaires polykystiques ou en cas de kyste résiduel.

Cas particuliers

-Les délais : Il est important de respecter des délais courts. En effet, le taux de grossesse augmente d’autant plus que les temps entre le recueil et la préparation, entre la préparation et l’insémination, et entre le recueil et l’insémination sont courts.

-l’éjaculation rétrograde : En cas d’éjaculation rétrograde, l’insémination est possible en recueillant les urines après leur alcalinisation (utilisation d’eau de Vichy, bicarbonate de soude la veille au soir). 

-Cas particulier des paraplégiques : On peut obtenir une éjaculation à l’aide d’un appareil électrique type vibro-masseur.

-Insémination avec sperme congelé : Le sperme congelé se présente sous formes de paillettes. On utilise une simple technique de lavage migration. On utilisera autant de paillettes qu’il est nécessaire pour obtenir une préparation de 1 000 000 de spermatozoïdes.